C'est un oiseau de brume, un oiseau de la lune, il marche dans son ombre, sur les rives d'un lac ou les barques reposent sur les reflets d'hier.
Perdu dans les reflets et noyé dans la brume, il ne sait ni les plumes ni le vent dans ses ailes, il a tout oublié. Il a cru si longtemps que cette ombre ténue, accrochée à ses pieds l'empêchait de voler. il ne voyait au loin que la valse floutée des silhouettes grises des bateaux de passage ... Pourtant au bout du gris, au delà des nuages, le ciel est toujours bleu … Le bleu est de tout temps, de tous vents de tout lieux. On le lui avait dit et l'oiseau y croyait. Le souffle de voix lointaines provenant des bateaux murmuraient bien souvent les jours d'épais brouillard: le bleu est là, accroche toi au bleu !
Les yeux écarquillés scrutant le coton blanc, il se disait : "courage, le bleu est là ..." Mais le bleu, l' oiseau de brume en avait oublié la couleur. Et il aurait aimé voler la haut, derrière les nuages pour s'emplir d'azur. Mais avec cette ombre accrochée à ses pattes il était bien évidemment condamné à marcher sur les rives d'un lac où les barques reposent sur les reflets d'hier...
Pour ceux qui se demandent comment dans le pays des brumes, sans bleu et sans soleil un oiseau peut marcher dans son ombre, j'ai envie de répondre : pour la même raison qui l'oblige à demeurer au sol attaché à cette ombre ….